mercredi 27 juillet 2011

Haute Route (Chamonix Zermatt)

La Haute Route est une randonnée glaciaire entre Chamonix et Zermatt. Cette traversee aux portes de la Suisse valaisanne se pratique toute l'année; l'été elle nécessite alors l'usage de crampons, cordes, piolet et surtout le soutien d'un guide pour traverser tant de glaciers.


Plusieurs mois avant notre départ, nous avons constitué une équipe, avec Jc, Bibi, son oncle Jean-Michel accompagné de son guide Rémy Sfilio. 5 personnes plus un guide, un format idéal pour former une cordée, découvrir la haute montagne, s adapter au niveau de chacun si besoin, retenir un copain s'il tombe dans une crevasse !


Étape 1 : Chamonix, L'Argentiere - Refuge Albert 1er (2700M) / D+500Mètres.

Nous sommes donc partis le lundi 21 aout 2011, décalés de quelques jours comparés aux autres cordées qui démarrent généralement le dimanche. Cela nous évitait ainsi trop de monde sur notre parcours. Un temps magnifique accompagne notre montée tranquille sur un chemin en balcon vers le Refuge Albert 1er, du nom du Roi des Belges, féru de montagne. Beaucoup de randonneurs sur notre parcours et nous découvrons toutefois l ambiance de haute montagne. Après une montée assez raide sur la moraine du galcier du Tour, oú chacun souhaite se rassurer sur sa forme physique ou son matériel, nous nous installons en fin d après midi dans notre dortoir ; les refuges du CAF ayant plutôt la réputation d'être spartiate, ce que nous constatons effectivement. Toutefois, cela nous permet de nous plonger tout de suite dans l'ambiance, d'autant que notre guide nous propose notre premier cours de manipulation de crampons et de marche sur le glacier. On apprend alors à enfiler rapidement nos crampons, à marcher sur glacier, plat, dévers, montée et descente avec le piolet. Les couleurs du ciel des fins de journée de juillet sont alors splendides et nous profitons déjà pleinement de cette journée. Elle se conclue par un diner avec menu unique de choucroute. Le refuge est plein comme un oeuf, avec une majorité d'hommes prêts à en découdre dés le lendemain. Nous partons nous coucher vers 21:30 car le réveil sonnera vers 3h45 !
La phrase du jour : savoir prendre son temps, dixit Jean-Mi.


Étape 2 - Refuge Albert 1er , Col supérieur du Tour, Refuge de Trient, Cabane d'Orny - Champex (D+/700mètres)
Premier réveil très matinal, où nous retrouvons nos amis alpinistes de la veille, très endormis au petit déjeuner de 4h. Pas trop froid, mais bien équipés avec nos polaires fines et vestes Gore tex, nous chaussons donc les crampons. Il est environ 6:30 quand nous abordons le glacier du Tour, avec lever du soleil sur le Mont Blanc, vue sur la Table en haut de l'aiguille du Tour et le Chardonney à notre droite. Nous la laissons à notre gauche et abordons la montée du Col Supérieur du Tour. C'est une pente forte, impossible sans crampons, qui ne nous fait pas peur car nous sommes en pleine forme pour aborder notre baptême glaciaire. Vers 8:00 nous arrivons au sommet du col, où nous devons franchir quelques roches vite avalées grâce à nos crampons qui accrochent aussi sur la roche granitique. La première récompense arrive vite puisque les rayons du soleil illuminent le glacier du Trient, veritable plateau niché à 3000 mètres environ. Nous faisons un première petite pause, en compagnie d'une cordee d'americains. Laissant quelques alpinistes parés pour escalader les aiguilles, nous découvrons alors la marche sur plateau glacier, qui dissimulent nombre de crevasses. Toutefois, elles sont très bien cachées et seul notre guide Rémy s'en inquiète. Nous passons ensuite devant les refuges de Trient et cabane d'Orny. Mais il y a beaucoup de pièges. Et tandis que nous croisons une cordée en difficulté, Jc marche sur un pont de neige et s'enfonce la jambe gauche jusqu'au bassin. Dans un mouvement réflexe, sa jambe droite tente de sortir, mais elle réussit surtout à enfoncer un crampon dans le mollet opposé. Plus de peur que de mal, mais Jc prendra la bonne décision de se faire soigner avec 2 points auprès d'un médecin à Champex. Nous quittons d'ailleurs le glacier au niveau de la cabane d'Orny avec sa belle statue de Chamoix sur les conseils d'un vieille alpiniste suisse. Le chemin est moins grisant que le glacier mais en montagne, on est jamais trop prudent ... La descente s'effectue sur une moraine assez facile, et laissant quelques énormes blocs de pierre, nous pique-niquons au frais d'un petit col. L'effet Ventury produisant une fraicheur ventée pour accompagner notre dégustation de jambon, saucisson, fromage.

La descente se poursuit sur un chemin en balcon, sécurisé par quelques chaines. Alors que tous foncent comme des cabris, David et Bibi redoublent de prudence.

Vers 15:00, nous arrivons à Champex oú nous logeons à l'hôtel "au Club Alpin" avec une terrase magnifique sur le petit lac et petite chambre pour notre équipe seule. Nous en profitons pour prendre notre première et unique douche de notre semaine. Tandis que Jc part se faire soigner, Fabienne s'achète un sac à dos adapté à notre programme montagnard ambitieux.

Pour le diner, le guide nous apprend que la météo est mauvaise pour le lendemain. Le programme est alors modifié ; pas de cabane des Dix prêt du Pigne d'Arola mais la cabane Chanrion. Nous sommes déçus, voire un peu plus face à la prudence de notre guide. Nous partons nous coucher tôt, quelque peu dubitatif. Mais la nuit porte conseille ....
La phrase du jour : Vive les graines d'amandes et noisettes, c'est mieux que les pâtes, dixit Bib


Étape 3 - Champex, barrage Mauvoisin, Cabane Chanrion (D+/650mètres)

Après un réveil vers 5:30 et un petit déjeuner rapide, nous montons comme prévu dans un taxi pour demarrer notre randonnee au barrage de Mauvoisin. Des trombes d'eau nous accompagnent et nous comprenons rapidement qu'il était sage d'être prudent .... Car c'est sans doute la neige et le brouillard qui nous auraient peut être bloqué sur un parcours plus alpin. Nous empruntons donc un chemin de moyenne montagne, comme nous en connaissons plein. Toutefois, cette journée de transition nous permet de reposer nos organismes au troisième jour de notre randonnée. Néanmoins, nous arrivons vers 13:00 après 5 heures de marches. Pas si mal pour une journée de repos et 500 mètres positif. Ce refuge posé près d'un petit lac nous donne envie de le rejoindre. Mais grêle et tonnerre nous en empêchent. Nous rentrons prendre un bon thé, avant de lire un peu. Petite sieste pour les uns, grande sieste pour notre guide qui enchaine semaine après semaine, avant de tous nous retrouver pour le diner de 18:30 dans une ambiance montagnarde chaleureuse et enjouée. Toute la charpente du refuge sert à faire sécher les vêtements des convives, qui se pressent dans la salle à manger. Remy nous donne quelques cours sur l'utilisation d'une carte et de son GPS, un rappel sur les noeuds, tandis que Bibi abordent une cordée d'américains chirurgiens dans une discussion enflammée sur la couverture sociale européenne. Après un excellent diner à base de soupe et quelques discussions sur le marketing des montagnes, nous partons nous coucher ves 21:00 dans notre dortoir que nous partageons avec une équipe d'anglais.
La phrase du jour : écouter son client, c'est être marketing, dixit Jc


Étape 4 - Cabane Chanrion, Glacier d'Otemma, cabane des Vignettes (3100m) (D+/800mètres)

Nous partons toujours aussi tôt en démarrant par un chemin de randonneur classique. Après quelques hésitations sur la route à suivre, nous retrouvons donc l'ambiance glaciaire qui va nous suivre pour les 3 jours à venir. Nous démarrons donc avec le galcier d'Otemma. S'il ne comporte aucune crevasse et parait donc facile, il n'en est rien. Près de 5km de faux plat pour 500m de dénivelé positif usent rapidement nos organismes. Nous évoluons tout d'abord dans la moraine, assez cassante, puis sur le glacier lui-même. A cette altitude, 2400mètres, nous trouvons des fleurs de Genépi, caractéristiques de ce type d'endroit. La glace est dure et la pente naturelle crée avec la fonte de longues rigoles de glaces. Assez fines, il n'est pas toujours aisé d'y placer nos gros godillots ce qui ralentit notre pas. Des moulins (à eau) s'écoulent avec une force impressionnante dans quelques trous du glacier. Enfin, vers 13h00, nous nous retrouvons au bout du glacier au col de Charmotane, au pied du Mont Colon et de la crête sèche ! Face à nous, le glacier tombe en sérac, à droite le Col de L'Évêque (que nous emprunterons le lendemain) et à gauche la trace crevassée pour rejoindre la cabane des Vignettes. Nous faisons une pause à ce grand carrefour désert, en plein nuage. Nous sommes récompensés de quelques éclaircies et nous réaliserons le lendemain que nos visages ont été brulés par le soleil à peine voilé. Après quelques morceaux de jambons, saucissons et autre Beaufort, nous repartons pour quelques kilomètres à peine qui nous prendrons plus d'une heure. En effet, ayant neigé la veille (nous sommes à 3100 mètres), des ponts de neige se sont formés. A 50 mètres à peine de la fin du glacier, pris dans un brouillard épais, Remy décide de cramponner et de nous encorder. Tout le monde se sent plus rassurés et ne regrette pas cette perte de temps. D'autant qu'une fois l'obstacle des crevasses franchis, nous abordons un replas au pied d'immenses séracs. Enfin, au détour d'une arête, nous découvrons la Cabane des Vignettes. Entièrement refait, ce refuge allie modernisme et esprit de montagne. Enfin des endroits malins pour ranger cordes piolet et matériels en bas au rdc, le long d'un couloir vitré donnant sur une pente vertigineuse (le bout du glacier d'Otemma). A l'etage une grande salle de restaurant avec de belles tables en bois côtoie l'ordinateur ultra connecté du patron. Les douches sont en pannes, mais il est agréable d'accèder à un espace moderne de toilette. Après une bonne sieste et quelques appels vers nos progénitures blagueuses et nos parents inquiets, nous nous retrouvons pour un diner excellent, où cette fois la consommation de l'eau de montagne est au centre des débats. Fabi donnant alors un cours sur l'esprit montagnard, laissant Remy lui-même goguenard !
Vers 21:00, nous remontons dans notre dortoir partagé avec nos poursuivants espagnols.
La phrase du jour : J'aime pas les gens, dixit un ami guide de Remy


Etape 5 - Cabane des Vignettes - Plan de Bertol - Cabane Bertol (3311m) (D+/1100mètres)

5h00 environ quand nous enfilons nos crampons et plaçons la corde à nos baudriers. Le soleil est de retour et rosit les montagnes alentours. Nous repartons et passant sous le sérac, reprenons le Col de Charmotane et abordons sans difficulté le col de L'Évêque. La pente est forte mais la neige à 7 heures est encore dure et nous montons donc sans difficulté. Bien encordés, nous arrivons au sommet du Col vers 8 heures avec une vue magnifique. la redescente s'effectue sans grande difficulté et nous retrouvons une moraine. Du classique à présent. Nous arrivons vers midi au Plan de Bertol. Le spectacle est surprenant. D'un coté toujours le col de Charmotane, mais cette fois vu d'en bas ; nous devinons aussi la cabane des Vignettes laissée le matin même. Et à 180 degrés, se trouve notre objectif du jour : la cabane Bertol. On la devine au loin, haut perché, précédée d'un immense névé pour y accéder. Après donc une pause picnic rapide, nous entamons la remontée dans des gros blocs de pierre, puis abordons le névé. Environ 2 heures de montée difficile car la neige fond, la pente est raide et nous fatiguons un peu. Bibi et Jean-Mi s'encordent, tandis que Fabi sort son piolet pour assurer sa progression (cf. Annapurna premier 8000 ...). Arrivée la première au pied de l'immense échelle d'accès au refuge, elle prend son courage à deux mains et s'élancent pour cette montée de 50mètres ou 100mètres, je ne saurais dire. Par contre, la montée est aérienne, et il faut s'armer de tout son courage pour accéder à la platefome du refuge. La récompense est à la hauteur ... Une vue à 360 degrés, vertigineuse, un confort classique de refuge, et un grand soleil. Mais à 3300 mètres, les vestes en duvet sont nécessaires pour apprécier une bière en terrasse. Tout le monde est arrivé avec un grand bonheur. Nous profitons aussi d'une démonstration d'escalade par un jeune couple suisse qui grimpa au sommet du col de Bertol, suivi d'une opération de voltige par un aviateur impressionnant de dextérité. En passant à quelques mètres du refuge, il manie son manche pour battre des ailes ou partir en piqué ! Bibi évite la sieste et poursuit son cours à la cordée d'américains à propos des atouts de la Suisse et du système comparé de couverture médicale , tandis que Fabi sympathise avec un producteur de cinema anglais. On trouve vraiment de tout à Bertol ! Bon diner encore et nous partons nous coucher car demain est un grand jour.
La phrase du jour : Quand on a le vertige, il faut foncer, dixit Fabi


Etape 6 : Cabane Bertol - Glacier du Stöcki - Refuge SchönBiel (D+/650Mètres)
Départ vers 5h30 dans une petite bousculade. Le refuge est petit, la plateforme étroite et il faut redescendre les échelles. Mais cette fois, tout le monde est encordé ; pas de blague matinale ! Une fois en bas, nous chaussons les crampons car nous partons pour 4 à 5 heures de glaciers. Après une longue traversée, nous abordons la montée à Tête blanche. ce dôme n'est pas trop pentu mais il culmine à 3800mètres. La fatigue et les nausées s'emparent de Bibi qui s'effondre à cause du mal des montagnes. Remy, gardant son sang-froid, trouve les mots pour la réconforter et nous arrivons enfin au sommet pour découvrir le Cervin. Le clou de notre semaine. Après une pause rapide, nous descendons le glacier du Stöcki avec ses immenses crevasses cathédrales. Rassurés en plein soleil, ce parcours serait quasi-infranchissable par temps de brouillard, nous sommes vraiment chanceux. La descente s'effectue sans problème, puis nous devons quitter le glacier pour contourner un immense rocher qui propose un chemin aérien. Pour une fois, nous nous encordons, même si Fabi et Jean-mi avancent d'un pas sûr et léger. Une moulinette nous attend un peu plus loin ; nous préférons descendre encordés pour ce passage d'escalade. Et comme toujours, la moraine constituée de grosses pierres freinent notre allure. Une pause rapide où nous finissons nos dernières réserves de saucissons et arachides et nous repartons dans un pierrier où il faut rester vigilant pour éviter les chutes de pierre. Enfin nous rejoignons un chemin de randonneur pour atteindre la cabane de SchönBiel face au Cervin. Arrivé un peu avant la troupe et la cordée des espagnols, je commande rapidement 3 Rojties et 2 omelettes complètes que nous dévorons rapidement. Le reste de la journée est consacré aux récits de course : l'actuel, la montée au Cervin de certains, et les prochaines autour du MontRose que l'on devine au loin. Une dernière toilette rapide dans l'eau glacée des montagnes, et nous profitons de ces derniers instants privilégiés.
La phrase du jour : Herzog n'était pas le meilleur !

Etape 7 : Cabane Schönbiel - Zmutt - Zermatt

Après quelques heures de marches dans une ambiance de randonneurs, nous arrivons sur Zermatt entourés de montagnes à découvrir lors de futurs sorties. Le Mont Rose et ses 4000 nous tendent les bras. A moins qu'un détour par le Vignemale se fasse avec à Remy.

Nous sommes heureux de finir mais pas d'en finir ...
Puis, nous prenons le train jusqu'à Täsch dans la vallée de Sion et le taxi jusqu'à Chamonix 2h30 plus tard.